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Auditions #
Audition libre #
Instaurée par la loi n°2014-535 du 27 mai 2014 portant transposition de la directive 2012/13/UE, relative au droit à l’information dans le cadre des procédures pénales. Elle permet de limiter la pratique consistant à entendre en qualité de témoin des personnes sur lesquelles pèsent néanmoins un soupçon, sans leur notifier leur droit. Elle est prévue aux articles 61-1 et 61-2 CPP.
Conditions #
L’audition libre consiste à entendre une personne suspectée, mais libre de quitter les lieux.
Elle peut intervenir dans le cadre d’une enquête de flagrance, préliminaire, sur CR ou d’une enquête douanière. Si les conditions prévues par le CPP sont réunies (suspicion et absence de contrainte), il est possible de procéder à l’audition libre d’une personne à la suite:
- d’une rétention en chambre de sûreté (cellule de dégrisement) (L. 3341-2 CSP);
- d’un dépistage d’alcoolémie (L. 234-18 C. route);
- d’un dépistage de stupéfiants (L. 235-5 C. route).
En cas de transformation d’une audition en GàV dans un temps continu, la durée de la première s’impute sur celle de la seconde.
JP : transformation en GàV
Crim., 6 mai 1997, n°96-80369 ; 97-81026
En cas de cumul, pour les mêmes faits, d’une garde à vue avec audition sans contrainte, la durée de l’audition préalable s’impute sur cette dernière si l’audition et la garde à vue se situent dans un temps continu (dans ces deux arrêts : 15 min de délai).
Crim., 28 juin 2000, n°99-81688
Pas d’imputation de délai si l’audition et la garde-à-vue sont espacées de plusieurs mois.
Notification des droits #
Le statut de suspect conduit à la notification des informations suivantes :
- qualification, date et lieu présumés de l’infraction;
- droit de quitter les locaux à tout moment;
- droit d’être assisté par un interprète, le cas échéant;
- droit de faire des déclarations, répondre aux questions ou se taire;
- si l’infraction est punie d’une peine d’emprisonnement, droit d’être assisté au cours de l’audition de la confrontation par un avocat;
- possibilité de bénéficier de conseils juridiques dans une structure d’accès au droit.
JP : notification des droits
Une personne ne peut être entendue sous le régime de l’audition libre « qu’à la condition d’avoir été informée de la nature et de la date de l’infraction qu’on la soupçonne d’avoir commise et de son droit de quitter à tout moment les locaux de police ou de gendarmerie » (réserve d’interprétation art. 62 CPP).
Crim., 1 mars 2016, n°14-87.368
Un individu interpellé sur la voie publique, informé de la nature et de la date de l’infraction, n’a pas à être informé des droits visés à l’article 61-1.
Crim., 21 mars 2017, n°16-83124.
Nullité de l’audition libre pour défaut d’information du droit de quitter les locaux.
Observations
Voir aussi : Crim., 15 déc. 2015, n°15-90.104.
Crim., 17 févr. 2016, n°15-80984
L’absence de notification du droit de se taire n’affecte pas la régularité de l’audition libre si des éléments autres que ses déclarations existent à l’encontre de l’intéressé.
Observations
Voir aussi : Crim., 18 fév. 2015, 13-88.453 ; 12 juin 2014, n°13-80.974.
Rétention des témoins #
L’article 62 CPP envisage différentes hypothèses d’auditions de témoins:
- en l’absence de soupçon, les témoins sont entendus librement ;
- « si les nécessités de l’enquête le justifient », ils peuvent être retenus pour une durée inférieure à 4 heures;
- si des soupçons apparaissent lors de l’audition/rétention, celle-ci se transforme en audition libre ou en garde-à-vue, les droits afférents à ces mesures étant notifiées à l’intéressé. La GàV est obligatoire en cas de soupçon de commission d’une infraction punie d’une peine d’emprisonnement (62, al. 3).
Autres auditions #
Des auditions particulières peuvent également être menées, sous les mêmes conditions:
- par les fonctionnaires et agents publics (28 CPP);
- les fonctionnaires et agents des collectivités territoriales et de leurs établissements publics habilités à rechercher et constater des infractions au Code de l’environnement (. 172-8 C. env.)
- les agents de l’Autorité de la concurrence (L. 450-4 C. comm.);
- les agents de la DGCCRF (L.512-60 C. conso.);
- les services des douanes (67 C. douanes);
- le membre de l’Arcom chargé de l’envoi des recommandations et ses agents assermentés (L.331-15 CPI).
Garde à vue #
On évoquera ici que la garde à vue des majeurs. La situation des mineurs est évoquée plus bas.
« Seul l’OPJ peut, d’office ou sur instruction du procureur de la République, placer une personne en garde à vue ».
Avoir avec soi en GàV :Pratique : en GàV
Modèle : observations en GàV
Motifs #
La personne gardée à vue doit être majeure, sous réserve du régime applicable aux mineurs et étant précisé que l’âge est apprécié lors de la garde à vue et non lors de la commission des faits1.
La personne doit être suspectée (« raison(s) plausible(s) de soupçonner ») et conduite sous contrainte de la force publique devant un OPJ (à défaut : audition libre).
La GàV doit également être l’« unique moyen2 » de parvenir à l’une des finalités suivantes (62-2 CPP):
- probatoire
- permettre l’exécution d’investigations impliquant la présence ou la participation de la personne;
- empêcher que la personne ne modifie des preuves ou indices matériels;
- empêcher que la personne ne fasse pression sur des témoins, victimes ou leurs familles et proches;
- empêcher que la personne ne se concerte avec des coauteurs/complices.
- sécuritaire
- garantir la présentation de la personne devant le PR;
- garantir la mise en oeuvre de mesures destinées à faire cesser le crime ou le délit.
Une perquisition effectuée sans contrainte ne nécessite pas un placement en garde à vue Crim., 28 mars 2017, n°16-85108 La chambre de l’instruction doit contrôler que la GàV remplit les exigences de 62-2 CPP et peut, à cet égard, relever un autre critère que celui ou ceux mentionné.s par l’OPJ. Crim., 7 juin 2017, n°16-87.588 Le placement en garde à vue est le « seul moment à prendre en considération pour le contrôle de légalité de la mesure ». Crim., 7 juin 2017, n°16-87.588 Nullité de la GàV aux fins de garantir la présentation devant le PR d’une personne ayant déjà déféré à une réquisition aux fins de remise de pièce, comparu volontairement avant son placement et disposant d’une famille et d’une situation connue (nb : notaire). L’audition libre est suffisante.JP : nécessité
JP : motifs (moment de l’appréciation)
JP : motifs (présentation au PR)
Mesures corrélatives #
CEDH : art. 5§2 (Garanties pour les personnes privées de liberté)
Finalité de la mesure #
Toute personne arrêtée doit connaître les motifs de son arrestation et pouvoir en contester la légalité (Khlaifia et autres c.Italie, 2016, §115 ; Fox, Campbell et Hartley c. R-U, 1990, §40).
Délais #
Les raisons doivent être communiquées « dans le plus court délai », exigence satisfaite si l’information est donnée dans un délai de quelques heures (Khlaifia et autres c.Italie, 2016, §115 ; Fox, Campbell et Hartley c. R-U, 1990, §40 ; Murray c. R-U, 1994, §72.).
Contenu #
Toute personne arrêtée doit disposer des informations juridiques et factuelles suffisantes pour contester la légalité de la mesure devant un tribunal Khlaifia et autres c.Italie, 2016, §115 ; Fox, Campbell et Hartley c. R-U](http://hudoc.echr.coe.int/fre?i=001-62277), 1990, §40)
Modalités #
Les raisons de la privation de liberté n’ont pas à être données par écrit et peuvent être devenues apparentes lors d’interrogatoires ultérieurs (Fox, Campbell et Hartley c. R-U, 1990, §41 ; Murray c. R-U, 1994, §77.).
Notification des droits #
La personne placée en garde à vue est « immédiatement » (63-1) informée de ses droits par un OPJ/APJ, ce qui correspond pour la dernière JP à un délai max de 30/45 min. (à compter du placement par un OPJ : 63, III CPP).
Des « circonstances insurmontables » peuvent néanmoins justifier le retard de la notification.
Crim., 19 mai 1999, n°99-81.296 Pas de nullité du PV de GàV pour défaut de notification dès l’interpellation, les conditions de notification n’étant pas satisfaisantes sur la voie publique, dès lors que la notification est effectuée dès le retour au service.
Crim., 10 mai 2011, n°10-87.362 Nullité de la GàV pour retard dans la notification des droits non justifié par des circonstances insurmontables. Crim., 6 janvier 2015, n°13-87.652 Pas de nullité de la GàV pour un retard de 35 minutes dans la notification des droits, ce délai correspondant au temps nécessaire à la patrouille de police pour se rendre au commissariat. Crim., 24 mai 2016, n°16-80.564 Nullité de la GàV pour un retard de 30 min. dans la notification des droits non justifié par des circonstances insurmontables.JP : délai de notification
Observations
Voir aussi : Crim., 12 févr. 1997, n°96-85720 ; Crim., 14 déc. 1999, n°99-84148. La Cour de cassation a pu valider des délais de transport de 10 min. (Civ.1, 27 mai 2010, n°09-12397), 15 min. (Crim., 26 juil. 2000, n°00-833462) ou 35 min. (Crim., 06 janv. 2015, n°13-87652).
JP : circonstances insurmontables
Avis au PR #
63, I CPP : « dès le début de la mesure » l’OPJ informe le PR, « par tout moyen », du placement de la personne et lui donne connaissance des motifs de placement (cf. 62 CPP) et de la qualification des faits.
Comme pour la notification des droits, la JP estime qu’au-délà de 45 minutes l’avis est tardif sauf circonstances insurmontables.
Cette information peut néanmoins être donnée par tout moyen.
Crim., 4 nov. 2015, n°15-82.456 Nullité de la GàV pour défaut d’information du PR des motifs et qualifications du placement.
Crim., 2 févr. 2005, n°04-86.805 Un retard ou l’absence d’information donnée au JI non justifié par des circonstances insurmontables entraîne la nullité de la GàV. Crim., 24 mai 2016, n°16-80.564 Un retard de 45 min. non justifié par des circonstances insurmontables dans l’avis donné au PR entraîne la nullité de la garde-à-vue.
Crim., 13 avril 2023, n°22-85.907 L’avis à magistrat n’est soumis à aucun formalisme particulier.JP : avis magistrat (principe)
Observations
Voir aussi : Crim., 25 juin 2013, n°13-81.977 (le défaut d’accomplissement de cette formalité cause nécessairement grief).JP : avis magistrat (retard)
Observations
Le délai de 45 min. est le plus court admis par la JP. Mais on peut également relever : 27 juin 2017, n°16-86.354 : 0h53 de retard ; 25 juillet 2001, n°01-83.864 : 1h15 de retard ; 23 juin 2004, n°04-82.638 : 1h15 de retard ; 20 mars 2007, n°06-89.050 : 1h15 de retard ; 18 mai 2005, n°04-50.018 : 2h de retard ; 19 déc. 2007, n°07-83.340 : 2h35 de retard ; 23 août 2006, n°06-83.790 : 2h47 de retard.JP : avis magistrat (formalisme)
Mesures de sécurité #
Art. 63-5 CPP : « La garde à vue doit s’exécuter dans des conditions assurant le respect de la dignité de la personne. Seules peuvent être imposées à la personne gardée à vue les mesures de sécurité strictement nécessaires. ».
Les mesures de sécurité qui peuvent être pratiquées en GàV sont définies par un arrêté ministériel (63-6) dont le dernier en date (1er juin 2011) dresse la liste suivante :
- palpation de sécurité, pratiquée par une personne du même sexe au travers de vêtements ;
- un moyen de détection électronique ;
- le retrait d’objets et d’effets pouvant constituer un danger pour la personne ou pour autrui ;
- le retrait de vêtements, effectué de façon non systématique et si les circonstances l’imposent.
La personne gardée à vue dispose, au cours de son audition, des objets dont le port ou la détention sont nécessaires au respect de sa dignité (63-6 al. 3 CPP).
Menottes ou entraves #
Le port des menottes ou des entraves est exclu sauf si la personne est considérée dangereuse pour elle-même ou pour autrui ou en cas de risque de fuite (803 CPP).
JP : menottes/entraves
Crim., 13 mai 2014, n°13-82005
Le juge doit analyser les circonstances particulières imposant d’adopter le port de menottes. L’analyse doit être d’autant plus circonstanciée que la personne est tétraplégique et paralysée des bras et des jambes (Crim., 7 mai 2008, n°08-81419).
Observations
En l’espèce, pas de cassation dès lors que les juges ont fondé leur déclaration de culpabilité ni exclusivement ni essentiellement sur les déclarations faites par le prévenu pendant sa garde à vue.
Fouille intégrale #
La fouille intégrale n’est pas une mesure de sécurité (63-6 CPP) et ne peut être effectuée que si elle est « indispensable pour les nécessités de l’enquête » et que la fouille par palpation ou l’utilisation d’un détecteur ne peut être réalisée (63-7).
Elle ne peut être décidée que par un OPJ et réalisée dans un espace fermé, par une personne de même sexe.
JP : fouille intégrale
Crim., 5 juin 2012, n°11-84895
« l’état de fragilité de l’intéressé après les faits qui avait nécessité l’intervention du SAMU, des pompiers et d’un médecin, pouvait justifier une [fouille intégrale] pour s’assurer que les vêtements qu’il portait ne pouvaient lui permettre d’attenter à ses jours »
Crim., 20 nov. 2013, n°13-84280
La nécessité de rechercher un objet justifie la fouille intégrale d’un mineur poursuivi pour des faits d’agression sexuelle.
Fouille corporelle interne #
La fouille corporelle interne ne peut être décidée que si elle est indispensable pour les nécessités de l’enquête et pratiquées uniquement par un médecin requis à cet effet (63-7).
Durée #
Pour le calcul de sa durée, le point de départ de la garde à vue est fixé au moment de la première mesure de contrainte préalable même si celle-ci n’est pas décidé par un OPJ (63, III CPP), en principe seul capable de placer en GàV.
Durée | Motif | Condi° forme | CPP |
---|---|---|---|
24h | - | - | 63,II,al.1 |
+24h (48h) |
- prolong = unique moyen de parvenir à l’une des finalités de la GàV - crime/délit ≥ 1 an |
- autorisée par PR et notifiée à l’intéressé - présentation préalable au PR, dispense « à titre exceptionnel » |
63,II,al.1 |
+24/48h (72/96h) |
- nécessités de l’enquête l’exigent - infraction prévue à 706-73 CPP |
- prolong par JLD saisi par PR - présentation préalable au JLD obligatoire |
706-88 |
+24/48h (120/144h) |
- risque sérieux de l’imminence d’une action terroriste (421-1 à 421-8 CP) en FR ou à l’étranger ou - les nécessités de la coop INT le requièrement impérativement |
- prolong par JLD saisi par PR - présentation préalable au JLD sauf, à titre exceptionnel, en raison des nécessités des investigations en cours ou à effectuer. |
706-88-1 |
La loi a prévu que la durée des gardes-à-vue pour les mêmes faits se cumulaient (63, III, al. 2 CPP), même dans des cadres d’enquête différents (ex : flagrance/instruction). Pour des faits différents, les durées de garde à vue ne se cumulent pas (et permettent de dépasser la durée maximale prévue) à condition que celles-ci aient été sufissament éloignées dans le temps.
JP : gav (cumul)
Crim., 2 sept. 2004, 04-84.010
Le délai maximal de GàV cumulées peut être dépassé dès lors qu’elles portent sur des faits distincts et sont suffisamment espacées dans le temps (10 mois en l’espèce).
Garanties de la GàV #
Garanties inhérentes #
Enregistrement audiovisuel #
Les auditions des mis en cause pour crime, effectuées dans un local de gendarmerie ou de police, font obligatoirement l’objet d’un enregistrement audiovisuel (64-1 CPP).
La loi prévoit deux cas d’impossibilité de procéder à l’enregistrement :
- impossibilité matérielle : impossibilité en raison du trop grand nombre de mis en cause qui doivent être interrogés simultanément, dans la même procédure ou dans des procédures distinctes. L’OPJ doit en informer sans délai le PR qui désigne, par une décision écrite versée au dossier, au regard des nécessités de l’enquête, la ou les personnes dont les auditions ne seront pas enregistrées;
- impossibilité technique : imposibilité à raison d’un défaut du matériel, qui contraint l’OPJ à en aviser immédiatement le PR et à faire mention de cette impossibilité dans le PV d’audition.
JP : gav (enregistrement)
Crim., 11 juil. 2012, n°12-82136
Le défaut d’enregistrement de la garde à vue ne rend pas la garde à vue irrégulière dès lors qu’elle a été réalisée à l’hôpital (donc hors locaux de police/gendarmerie de PJ).
Observations
Voir également Crim., 1 avr. 2009, n°08-88549 pour un IPC dans un hôpital.
Crim., 13 mai 2015, n°14-87.534
L’omission des prescriptions de l’article 64-1 CPP relatives (à l’information du PR en cas d’impossibilité d’enregistrer toutes les auditions) porte nécessairement atteinte aux intérêts de la personne qu’elle concerne.
Observations
Voir aussi : Crim., 22 juin 2010, n°10-81275 ; 3 mars 2010, 09-87.924.
Crim., 8 juil. 2015, n°15-81025
En l’absence d’atteinte aux intérêts du demandeur il importe peu qu’il ne soit pas fait mention dans le PV du placement sous scellé du CD original dès lors que la copie faite de celui-ci y est mentionnée.
Crim., 28 fév. 2017, n°16-85621
Lorsque l’enregistrement d’une troisième audition est défectueux alors que les deux premiers sont corrects, il faut considérer qu’il s’agit d’une circonstance insurmontable faisant obstacle à l’enregistrement, la mention de l’incident dans le PV et l’information du PR.
Droits de la personne gardée à vue #
Droit de faire prévenir un tiers #
La personne gardée à vue peut faire prévenir tout personne de son choix de son placement en garde à vue (63-2 CPP).
Droit à un examen médical #
La personne placée en GàV peut solliciter un examen médical lors du placement et de la prolongation. L’examen médical peut également être sollicité par un membre de la famille (qui est de droit) ou décidé d’office par le PR ou l’OPJ (63-3 CPP).
Le médecin se prononce sur « l’aptitude au maintien en garde à vue et procède à toutes constatations utiles », le certificat étant versé au dossier. Si l’examen conclut à l’incompatibilité de la garde à vue, la personne doit immédiatemenht être remise en liberté.
Le médecin doit être sollicité (et non intervenir) dans un délai de 3 heures à compter de la demande.
Crim., 25 mai 2016, n°16-80379 Une personne mise en examen qui n’a pas sollicité un examen médical ne saurait invoquer le non respect du délai de trois heures (examen à l’initiative de l’OPJ). Crim., 24 janv. 2007, n°03-85061, 06-84330 Il peut être déduit du temps nécessaire au déplacement du médecin, du déroulement de l’examen et à la rédaction du certificat médical et du PV d’annexion de pièces que l’heure de délivrance de la réquisition du médecin a été délivrée avant l’expiration du délai de trois heures. Crim., 18 déc. 2007, n°07-86.955 L’avis médical ne porte pas sur les facultés intellectuelles de l’intéressé. Crim., 27 oct. 2009, n°09-82.205 « la poursuite de la garde à vue d’une personne dans des conditions qui sont, selon le constat médical, incompatibles avec son état de santé, porte nécessairement atteinte à ses intérêts » Crim., 11 juill. 2012, n° 12-82136 Si le service des urgences juge l’état de santé de l’intéressé compatible avec la garde à vue et que ses droits sont notifiés, n’est pas nulle pour incompatibilité avec son état de santé, la garde à vue d’une personne hospitalisée pour une opération. Crim., 14 fév. 2012, n°11-87691 Si le médecin pose dans le certificat médical la réserve d’une prise de médicaments mais qu’il n’en prescrit aucun alors il faut en déduire que la garde à vue s’est déroulée dans des conditions compatibles avec son état de santé. Crim., 1 fév. 2011, n°10-83017 S’il ne peut être établi que le prévenu a bien pris les médicaments prescrits par le médecin en garde à vue mais que lors d’un nouvel examen médical ordonné spécialement par le JLD avant l’audience son état de santé est jugé compatible avec la détention, alors il faut en déduire que la garde à vue était compatible avec l’état de santé du prévenu. Crim., 30 mars 2016, n°15-86195 Dans un certificat médical jugeant l’état de santé incompatible avec une garde à vue sous réserve d’un examen psychiatrique, le médecin l’a également, dans le même certificat, jugé compatible sous réserve d’une surveillance physique continue de la personne durant la nuit et recommandant un examen psychiatrique ultérieur. La Cour de cassation a validé la garde à vue au motif que le médecin n’avait pas subordonné la compatibilité à un examen psychiatrique. Crim., 14 mars 2017, n°16-84352 Est nulle la garde à vue d’une personne dont l’état de santé était jugé compatible sous réserve d’une hospitalisation quotidienne à 8h et 20h mais qui n’a été conduit à l’hôpital qu’à 10h35 à la demande des pompiers suite à un malaise de l’intéressé.JP : examen médical (désignation)
JP : examen médical (déroulement)
JP : examen médical (compatibilité sous réserve)
Droit au silence #
JP : droit au silence
Crim., 6 janv. 2015, n°13-87652
« le droit au silence et celui de ne pas contribuer à sa propre incrimination ne s’étendent pas au recueil de données qu’il convient d’obtenir indépendamment de la volonté de la personne concernée » (refus de se soumettre à un éthylomètre puis à une prise de sang).
Crim., 14 avr. 2015, n°14-88515
Le recueil des déclarations faites par un gardé à vue dans le cadre d’une commission rogatoire n’attente pas au droit au silence dès lors que ce droit a été notifié au début de la garde à vue et que le gardé à vue dispose du droit de présenter des observations au juge d’instruction tendant à ce qu’il soit mis fin à la mesure lorsque ce magistrat se prononce sur son éventuelle prolongation.
« hors le cas de contrainte physique ou morale, qui ne peut résulter des seules questions posées par les enquêteurs, la personne gardée à vue est libre d’exercer son droit au silence, partiellement ou en totalité, ou d’y renoncer »
Observations
En l’espèce l’intéressé s’était prévalu de son droit au silence puis avait ultérieurement répondu à certaines questions. L’avocat soutenait que les policiers avaient usé d’un procédé déloyal consistant à lui répéter les mêmes questions à plusieurs reprises jusqu’à obtenir une réponse.
Droit à l’assistance d’un avocat #
Désignation - L’avocat peut être commis par le bâtonnier, choisi par le mis en cause ou par le proche dont il demande qu’il soit informé de la garde à vue, à condition que ce choix soit confirmé par le mis en cause lui-même (63-3-1, al. 2 CPP).
L’avocat « accomplit les diligences requises pour se présenter sans retard indu ». Si l’avocat ne peut être contacté ou ne peut se présenter dans un délai de 2 heures, le bâtonnier est saisi à nouveau par l’OPJ, l’APJ ou l’assistant d’enquête « sans délai et par tous moyens » aux fins de désignation d’un avocat commis d’office (63-3-1 CPP).
Audition et confrontation hors la présence de l’avocat - Deux mécanismes peuvent conduire à ce qu’une audition ou une confrontation ait lieu sans intervention de l’avocat désigné ou commis, pour des motifs identiques :
- « éviter une situation susceptible de compromettre sérieusement une procédure pénale »;
- « prévenir une atteinte grave et imminente à la vie, à la liberté ou à l’intégrité physique d’une personne ».
Le premier mécanisme est celui du report de la présence de l’avocat, prévu à l’article 63-4-2 CPP. Sur demande de l’OPJ, le PR peut autoriser un report de l’intervention de l’avocat pour une durée maximale de 12h. Le JLD, sur requête du PR, peut autoriser un report allant jusqu’à 24h. Dans les mêmes conditions il peut être décidé que l’avocat ne peut, pour une durée identique, consulter les procès-verbaux d’audition de la personne gardée à vue.
Les décisions de reporter l’intervention de l’avocat, qu’elles émanent du PR ou du JLD, sont écrites et motivées par référence aux deux motifs ci-dessus, « au regard des éléments précis et circonstanciés résultant des faits de l’espèce ».
Le second mécanisme est celui de l’audition ou de la confrontation sans délai, c’est-à-dire sans attendre l’arrivée de l’avocat, prévue à l’article 63-4-2-1 CPP. La décision, écrite et motivée, émane du PR sur demande de l’OPJ, si cette décision est « au regard des circonstances, indispensable » pour satisfaire l’un des deux critères énoncés plus haut. Si l’avocat arrive en cours d’audition ou de garde à vue, celle-ci est interrompue pour qu’ait lieu l’entretien si le mis en cause le souhaite, sinon l’avocat peut assister à l’acte en cours.
Conflit d’intérêt - Un conflit d’intérêt peut être soulevé par l’avocat lui-même, par le PR ou l’OPJ qui peuvent demander à l’avocat de se déporter et, en cas de refus de ce dernier, saisir le bâtonnier, qui est le seul à pouvoir trancher la question.
Crim., 24 juin 2009, n°08-87.241 Nullité de la GàV pour défaut de notification du droit de bénéficier d’un avocat. Crim., 5 nov. 2013, n°13-82.682 Nullité de la GàV pour refus de contacter un avocat, le gardé à vue en ayant demandé un après l’avoir refusé.
Crim., 4 juin 2008, n°07-87758 Si la personne gardée à vue déclare vouloir s’entretenir avec « Me X ou Me Y ou avec l’avocat commis d’office », l’assistance d’un avocat commis d’office est régulière dès lors qu’il n’intervient qu’après que des diligences aient été effectuées pour aviser l’avocat désigné. Crim., 21 oct. 2015, n°15-81032 Le refus d’informer l’avocat choisi porte nécessairement atteinte aux intérêts de la personne concernée. Crim., 28 juin 2005, n°04-50.050 Nullité de la GàV pour retard dans l’information de l’avocat désigné, en l’absence de circonstances insurmontables (58 min.). Crim., 3 juin 2008, n°08-81771 Le magistrat qui contrôle la GàV peut s’opposer à la désignation d’un avocat sur lequel pèsent des charges de recel, dès lors que le gardé à vue a été invité à désigner un autre avocat avec lequel il a pu s’entretenir. Crim., 20 oct. 1998, n°08-84990 Aucune disposition légale n’impose à l’OPJ de prendre contact avec l’avocat désigné sur une ligne de téléphone fixe si celui-ci n’est pas joignable sur son téléphone mobile. Crim., 9 fév. 2016, n°15-84277 Une grève de la commission d’office par le barreau constitue une circonstance insurmontable de nature à empêcher l’assistance du gardé à vue par un avocat.
Cette diligence effectuée, les OPJ n’ont pas à prendre contact avec le service de permanence pour chaque gardé à vue. Crim., 21 oct. 2015, 15-81.032 Seul le Bâtonnier a qualité pour trancher un éventuel conflit d’intérêt. Crim., 14 mai 2014, n°13-82.274 En l’absence de renonciation expresse à l’assistance d’un avocat, son absence porte atteinte aux intérêts du prévenu. Crim., 14 déc. 2011, n°11-81329 La renonciation à l’assistance d’un avocat n’est pas définitive et, si le gardé à vue change d’avis au cours de la GàV, il doit bénéficier de cette assistance.
Voir également : crim., 5 nov. 2013, n°13-82.682. Crim., 4 janv. 2012, n°11-83138 Dès lors que l’intéressé est informé de ses droits, qu’il déclare ne pas souhaiter s’entretenir avec un avocat et qu’aucun élément objectif ne permet de remettre en cause l’exactitude des énonciations du procès-verbal, la garde à vue est régulière. La valeur du contenu du PV ne saurait être remis en cause par une attestation de l’épouse du gardé à vue, avisée par téléphone de la GàV de son mari.JP : assistance de l’avocat (désignation)
Observations
Voir également : Crim., 14 déc. 2011, n°11-81.329 pour un changement d’avis du gardé à vue postérieurement à la prolongation.
Observations
Les OPJ doivent préalablement avoir la confirmation par le service de la permanence du barreau qu’aucune assistance au titre de la commission d’office ne serait assurée, ce dont la Cour de cassation doit être en mesure de s’assurer (implicitement : mention au dossier du contact).JP : assistance de l’avocat (conflit d’intérêts)
JP : assistance de l’avocat (renonciation)
Observations
Au visa de l’article 6§3 ConvEDH.
Si le local avocat ne garantit pas la confidentialité de l’entretien: Crim., 2 mars 2021, n°20-85.491 Nullité de la GàV pour défaut d’entretien avec l’avocat sur de nouveaux faits. Crim., 14 mars 2017, n°16-84352 Pas de grief à l’absence de PV mentionnant l’entretien avec l’avocat à la reprise de GAV dès lors que durant son hospitalisation (justifiant l’interruption de la GaV pendant 8 mois) la personne intéressée a eu toute liberté pour s’entretenir avec son avocat.Pratique : confidentialité de l’entretien
JP : assistance de l’avocat (entretien)
JP : assistance de l’avocat (accès au dossier)
Crim., 17 nov. 2015, n°15-83437
Toute méconnaissance des prescriptions édictées à l’article 63-4-1 CPP porte nécessairement atteinte aux droits de la défense.
Crim., 19 sept. 2012, n°11-88.111
« L’absence de communication de l’ensemble des pièces du dossier, à ce stade de la procédure, n’est pas de nature à priver la personne d’un droit effectif et concret à un procès équitable, dès lors que l’accès à ces pièces est garanti devant les juridictions d’instruction et de jugement »
Observations
La CourEDH n’exige pas l’accès à l’entier dossier : CEDH, 12 janv. 2012, Section 5, n°44385/02, Trymbach c. Ukraine ; 28 août 2012, n°71407/10, Simons c. Belgique.
Droit à un interprète #
La notification des droits doit se faire dans une langue que la personne comprend si elle ne parle pas français, « le cas échéant après qu’un formulaire lui a été remis pour une informatioon immédiate » (63-1 al. 3 CPP).
Si la personne est attteinte de surdité et qu’elle ne sait ni lire ni écrire elle peut être assistée par un interprète en langue de signe ou « par toute personne qualifiée maîtrisant un langage ou une méthode permettant de communiquer avec elle ». Il peut être recouru à un dispositif technique (63-1 al. 2 CPP).
Exploitation du téléphone #
Assimilation à la perquisition #
La présence de l’avocat n’est pas requise lors de l’exploitation du téléphone portable, dont le régime est assimilable à une perquisition non domiciliaire.
En revanche, l’interrogation du mis en cause sur le contenu du téléphone constitue une audition, nécessitant la présence de l’avocat.
JP : exploitation du téléphone (régime)
Crim., 12 janv. 2021, n°20-84.045
« Aucune disposition légale ne prévoit la présence de l’avocat lors de l’exploitation d’un téléphone portable, assimilable à une perquisition »
Refus de communiquer les codes #
Le refus, sur réquisitions délivrées conformément aux II et III du livre 1er du CPP, de donner le code permettant le déchiffrement d’un téléphone portable, dès lors que ce téléphone est équipé d’un moyen de crypotologie et qu’il est susceptible d’avoir été utilisé pour « préparer, faciliter ou commettre » un crime ou un délit, constitue une infraction (434-15-2 CP).
Les éléments constitutifs de l’infraction ne sont quasiment jamais entièrement réunis:
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Premièrement, il faut démontrer que le téléphone est équipé d’un moyen de cryptologie et que le code de déverouillage constitue une convention de déchiffrement. Celle-ci a été définie par la Cour de cassation dans un arrêt d’assemblée plénière aux termes duquel elle indique qu’il incombe au juge de vérifier que ces deux conditions sont satisfaites (Ass. Plén., 7 nov. 2022, 21-83.146). Or, bien souvent, les procès-verbaux comportent trop peu d’informations sur le téléphone portable (modèle, version de l’OS) afin d’établir l’existence ou non d’une convention de déchiffrement.
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Ensuite, il faut démontrer que le téléphone portable a été utilisé pour « préparer, faciliter ou commettre » un crime ou un délit (ce qui exclut, a priori, le renvoi de ce seul chef de prévention).
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Enfin, il faut que la demande de code soit adressée par voie de réquisitions, le texte renvoyant aux pouvoirs généraux de réquisitions des OPJ (Titre II : 60-1 pour la flagrance ; 77-1-1 en préliminaire) et des juges d’instruction (Titre III : 99-3), auxquelles une simple demande au cours d’une audition n’est pas assimilable.
JP : refus de communiquer les codes
Ass. Plén., 7 nov. 2022, 21-83.146
« il incombe au juge de rechercher si le téléphone en cause est équipé d’un [moyen de cryptologie] et si son code de déverrouillage permet de mettre au clair tout ou partie des données cryptées qu’il contient ou auxquelles il donne accès »
Observations
« une convention de déchiffrement s’entend de tout moyen logiciel ou de toute autre information permettant la mise au clair d’une donnée transformée par un moyen de cryptologie, que ce soit à l’occasion de son stockage ou de sa transmission »
Crim., 13 oct. 2020, 20-80.150
« une simple demande formulée au cours d’une audition, sans avertissement que le refus d’y déférer est susceptible de constituer une infraction pénale, ne constitue pas une réquisition au sens du texte précité »
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Crim., 25 oct. 2000, 00-83.253 (« les règles édictées par l’article 4 de l’ordonnance du 2 février 1945 visent à protéger le mineur, non pas en raison de son manque de discernement au jour des faits, mais en raison de sa vulnérabilité supposée au moment de son audition »). ↩︎
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Exigence de nécessité de la mesure, en écho au principe général qui commande que toute mesure de contrainte soit « au regard des circonstances de l’espèce, nécessaire à la manifestation de la vérité et proportionnée à la gravité de l’infraction » (art. prélim. CPP). ↩︎